Pour une politique de soutien à la diversité des expressions et des initiatives
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Contribution de l'UFISC pour la plénière du CNPS - Conseil national des professions du spectacle
Séance du 9 juin 2023, présidée par la ministre de la culture Rima Abdul Malak.
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La responsabilité publique en matière culturelle doit s'exercer de manière conjointe entre l'Etat et les collectivités territoriales dans le respect des droits culturels des personnes, ceci afin de défendre leur liberté, leur dignité, leur capacité à partager leurs ressources culturelles, permettre leurs chemins d'émancipation et leur participation toujours plus forte à la vie culturelle et démocratique. C'est cette ambition que nous servons et à laquelle nous appelons. Faire mieux diversité culturelle, en assurant et en développant la liberté artistique, en prenant soin et en faisant mieux relation avec les autres et avec le vivant. Et mettre en œuvre une politique de la diversité et de la solidarité articulée du local au national.
Les crises se succèdent, le monde et les relations sont mis à mal, les imaginaires se sclérosent. Il est urgent de défendre radicalement, à la racine, la diversité culturelle, commun de l'humanité et terreau de nos avenirs, de nos perspectives.
C'est pourquoi nous appelons à une défense sans détour des libertés artistiques comme des libertés associatives ou militantes contre lesquelles nous voyons les attaques se multiplier aujourd'hui. Il nous faut nous lever contre les censures réclamées par l'extrême-droite. Il nous faut défendre une diversité qui convie à toutes les représentations du monde et notamment aux plus minorisées. La grandeur d'une démocratie est justement de savoir soutenir la diversité des approches et des points de vue qui permettent le débat et qui sont aussi des contre-pouvoirs nécessaires. Ces attaques interviennent dans un contexte où de nombreux signaux traduisent cette volonté de remettre en cause les libertés et l'indépendance des associations et de renforcer le contrôle sur les organisations de la société civile.
La loi confortant le respect des principes de la République et ses dispositions relatives au Contrat d'engagement républicain, à l'élargissement des motifs de dissolution d'associations, au renforcement des mesures de contrôle des financements sont une traduction très concrète de ce tournant dans les rapports entre administrations et associations. Nous demandons l'abrogation du contrat d'engagement républicain et appelons à renouveler un cadre de confiance entre associations et collectivités publiques. Il nous faut collectivement réaffirmer que les libertés artistiques, culturelles, associatives, syndicales et militantes sont au cœur de notre pacte démocratique.
Nos inquiétudes sur le resserrement des activités et de l'emploi et sur la fragilisation des modèles économiques des structures du Tiers secteur, structures associatives et plus largement de l'économie sociale et solidaire, qui maillent nos territoires, sont fortes. Le contexte conjoncturel voit les effets de l'augmentation des couts énergétiques et de l'inflation détériorer toujours plus fortement les marges de manœuvre et capacités économiques de ces structures déjà fragiles. La perspective d'une politique de l'austérité, le désengagement de certaines collectivités territoriales comme le constat d'une concentration des moyens de financement ou de sauvegarde sur les opérateurs directs de l'État inquiètent fortement la grande diversité des structures que nous représentons.
Nous avons besoin d'une grande politique de soutien aux initiatives citoyennes pour appeler les forces citoyennes et créatives à s'investir toujours plus dans la vie artistique et culturelle.
Nous souhaitons une politique de l'emploi qui se renforce. Nous saluons la prolongation du Fonpeps et de ses dispositifs jusque 2025 comme l'annonce d'un soutien au spectacle occasionnel. Mais nous ne comprenons pas pourquoi les plus petites structures sont aujourd'hui empêchées de bénéficier du dispositif de diffusion en petites jauges. Le seuil de 3 artistes au plateau condamne certains secteurs comme la danse ou le conte et limite les possibles dans la musique et les différents domaines du spectacle vivant. Alors que les dernières mesures avaient ouvert en 2021 et 2022 le dispositif au plein air, les arts de la rue ne semblent plus éligibles au dispositif APAJ car travaillant dans l'espace public. Il est urgent de lever ces freins à l'emploi.
Alors que notre secteur connait et va connaitre encore plus en 2024 des tensions dans l'emploi, il nous faut mieux accompagner la pluralité des parcours professionnels, l'égalité entre les femmes et les hommes, la diversité dans nos métiers. C'est par l'appui à la structuration des milliers de TPE de l'économie sociale et solidaire majoritaires dans les secteurs du spectacle et notamment des équipes artistiques que pourra s'effectuer une plus grande qualité des parcours. C'est par le renforcement des protections sociales et non leur abaissement, comme l'impose la loi sur les retraites décidée par le gouvernement, que nous pourrons garantir la qualité des parcours de vie des personnes impliquées dans nos métiers.
La réalité de notre secteur est avant tout celle de milliers d'associations et petites entreprises de l'économie sociale et solidaire de moins de 10 salariés. C'est par leur accompagnement pour améliorer leur structuration, par le soutien à leur emploi, permanent et intermittent, que nous pourrons progresser. C'est par un appui aux formes alternatives à la concurrence, au renforcement des démarches de coopération, mutualisation, solidarités (à travers les collectifs artistiques qui se développent, les groupements d'employeurs, les foncières, les coopérations territoriales...), que nous pouvons trouver une nouvelle voie de consolidation pour notre secteur.
Nous avons besoin d'une politique d'appui aux équipes artistiques qui sont en première ligne et ne peuvent constituer la variable d'ajustement des difficultés financières du secteur. Les critères de conventionnement doivent être revus mais surtout le renforcement des budgets et la proposition de nouveaux dispositifs d'appui doivent être mis sur la table.
Un mot également des lieux non labellisés, intermédiaires et indépendants, lieux hybrides et alternatifs, tiers lieux solidaires qui attendent une ambition forte du ministère de la culture et ne peuvent être renvoyés aux seules politiques des collectivités territoriales bien que celles-ci soient nécessaires et importantes.
Les structures de l'ESS sont des alliées solides pour la mise en pratique des droits culturels et la transformation écologique. Elles appellent à plus de coopération, de solidarité et de coconstruction sur les territoires. Les expérimentations et les méthodologies qui font leur preuve comme les projets culturels de territoire ou les schémas d'orientation des arts et de la culture doivent être mieux soutenus. Les espaces de concertation comme les Coreps doivent être renforcés par la prise en compte des écosystèmes territoriaux et mieux articulés aux autres espaces existants tels les CTLC ou les conseils culturels des régions.
La culture doit être inscrite comme une dimension stratégique travaillée en interministériel pour faire émerger cet après qui fera suite aux bouleversements que nous vivons. Car elle agit sur le plan artistique comme éducatif et culturel, sur le plan social, écologique et économique.
Nous sommes convaincus que c'est par une plus large confiance aux principes de démocratie et de solidarité que nous relèverons les défis devant nous et redonnerons de la puissance à des imaginaires créatifs et transformateurs !
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